Accords_plateformes_SMAD
Sébastien Lachaussée et Elisa Martin-Winkel

Sébastien Lachaussée et Elisa Martin-Winkel

Accords entre plateformes SVOD et organisations de producteurs audiovisuels

Dans le cadre du décret SMAD publié en juin 2021, le CSA (nouvellement ARCOM) a signé en décembre 2021 des conventions avec Amazon, Disney+ et Netflix, venant compléter les dispositions du décret SMAD et organiser les modalités d’investissement de leurs signataires

Pour rappel, le décret SMAD prévoit la participation des plateformes aux financements d’œuvres audiovisuelles et cinématographiques, en renvoyant expressément aux conventions et cahiers des charges établis avec le CSA, s’agissant de la répartition entre œuvres cinématographiques et aux œuvres audiovisuelles, avec un plancher établi à 20 % de la contribution totale dans un sens comme dans l’autre, ou de 30% au profit des œuvres cinématographiques dans le cas d’une contribution à 25% du CA net HT (c’est à dire lorsque la plateforme SVOD propose annuellement au moins une œuvre cinématographique de longue durée dans un délai inférieur à douze mois après sa sortie en salles en France.

En premier lieu, il doit être noté que les conventions conclues en décembre 2021 ne viennent organiser les modalités que pour la partie audiovisuelle – les éditeurs ayant considéré que les conditions n’étaient pas réunies pour définir les modalités de leur contribution en matière cinématographiques. Ces conventions sont ainsi nécessairement incomplètes.

Au surplus, ces trois conventions appliquent strictement les planchers en prévoyant une répartition de 80% pour les œuvres audiovisuelles et 20 % seulement pour les œuvres cinématographiques. En ce sens, les œuvres cinématographiques sont très fortement désavantagées.

S’agissant du genre d’œuvres audiovisuelles soutenues, les conventions viennent instaurer des minima, applicables depuis le début d’année 2022. En ce sens, dans les 3 conventions, la part totale d’œuvres originales d’expression française bénéficiant de financement est fixée à 75%.

En revanche les taux par genre et la part de production indépendante varient selon la plateforme :

Disney + 

La plateforme a pris des engagements d’investissement en matière d’animation à hauteur de 3,5 % et de documentaire à hauteur de 1,5%. Dans les deux cas, 66% de ces investissements doivent être réalisés au bénéfice de production indépendante et 60% pour des OEF.

On s’étonne ici que la part d’animation soit très basse, alors même que la plateforme vise notamment le public jeunesse.

Netflix

L’engagement d’investissement en matière d’animation est de 4,4% dont 66% au bénéfice de production indépendante et seulement 0,6 % pour des documentaires, sans autres conditions. En terme de chiffres, cela correspond à un investissement de un million d’euros sur 160 millions d’investissement dans la production audiovisuelle.

Amazon prime vidéo

La plateforme a pris des engagements à hauteur de 3% pour les documentaires et la captation ou recréation de spectacles vivants, destinés intégralement à la production indépendante. Aucun engagement n’est pris en faveur de l’animation et ce alors même que la plateforme propose de nombreux programmes jeunesses d’animation.

Les syndicats de producteurs ont vivement critiqué les conventions signées et ce d’autant plus qu’il n’y a pas eu de négociation interprofessionnelle entre les acteurs concernés, sous couvert d’arriver à un accord rapidement.

Les faibles parts dédiées à l’animation ou au documentaire sont relevées mais également l’abaissement de l’engagement des plateformes conventionnées à l’égard des œuvres d’expression originale française (EOF) de 10 % par rapport à ce qui est prévu dans le décret SMAD.

Le SPI a ainsi relevé que les clauses de diversité au bénéfice de plusieurs genres, ont un impact totalement marginal.

Anim France que « le CSA n’a absolument pas défendu auprès des plateformes la diversité de la création indépendante française », suivi par de nombreux producteurs de documentaires.

S’agissant des films cinématographiques, dans le cadre des négociations relatives à la chronologie des médias, qui a vu la fenêtre de Netflix avancée de + 36 mois à + 15 mois après la sortie en salles, les organisations du cinéma français et Netflix ont conclu en février 2022 le premier accord entre le cinéma et un SMAD.

Au titre de cet accord et pour une durée de trois ans, Netflix s’engage à réaliser sa contribution aux œuvres cinématographiques comme suit :

  • au moins 30 millions d’euros par an dans la création cinématographique d’expression originale française,
  • au moins 17% du montant des préfinancements dans le financement d’œuvres d’expression originale française dont le budget est inférieur ou égal à 4 millions d’euros
  • un minimum de 10 films préfinancés par an.

Les producteurs se sont félicités de la signature de cet accord.  Toutefois, les effets de son application restent attendus ainsi que les futures conventions avec les différentes plateformes et il reste de la place pour des améliorations. 

 

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