Les « influenceurs » font désormais partie intégrante de l’espace médiatique, qu’il s’agisse de personnes actives sur facebook, instagram, ou youtube ou encore de personnalités liées à la mode ou à la téléréalité.
C’est donc naturellement que le secteur de la publicité profite de ce nouveau type de communication en collaborant avec les influenceurs de différentes façons. Il s’agit alors aux marques de bénéficier de l’aura de l’influenceur en y étant associé plus ou moins directement.
Cela peut passer par des contenus « sponsorisés » mettant en scènes les marques et leurs produits ou des rapports plus classique, les influenceurs servant d’égérie à une marque ou produit.
Dans ce cadre et ces différentes situations, il est nécessaire de considérer quel est le statut juridique des contenus produits en collaboration avec des marques et celui des influenceurs dans ce cadre. Ce sont ces statuts qui déterminent comment doivent s’organiser leurs rapports entre influenceurs, annonceurs, agence de publicités et producteurs de campagnes et films publicitaires.
Définition de l’influenceur et communications publicitaires
La recommandation communication publicitaire digitale de l’autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) est venue définir un influenceur comme «un individu exprimant un point de vue ou donnant des conseils, par écrit, audio et/ou visuel, dans un domaine spécifique et selon un style ou un traitement qui lui sont propres et que son audience identifie» qui « peut agir dans un cadre purement éditorial ou en collaboration avec une marque pour la publication de contenus (placement de produits, participation à la production d’un contenu, diffusion d’un contenu publicitaire, etc.). »
Cette recommandation rappelle par ailleurs que l’existence d’une collaboration commerciale entre un influenceur et un annonceur pour la publication d’un contenu doit obligatoirement être portée à la connaissance du public. La formulation dépendra naturellement de la nature de la collaboration et des situations mais doit être la plus claire possible « vidéo produite par », « contenu sponsorisé par », « publicité » etc.
A défaut de mention, la communication sera considérées comme une pratique commerciale trompeuse en application aux articles article L. 121-2, 3° et L 121-4 du Code de la consommation.
Surtout, ces collaborations sont qualifiables de publicités si les critères suivants sont réunis :
a) L’influenceur perçoit des avantages du fait de la création du contenu : rémunération financière ou avantage et contreparties quelle qu’en soit la forme et notamment remise de produits ou prestation de service en sa faveur ;
b) L’annonceur ou ses représentants exercent un contrôle éditorial prépondérant (notamment en imposant des mentions, un scénario…) et une validation du contenu;
c) La prise de parole de l’influenceur vise à la promotion du produit ou du service.
Dans ce cadre, l’ensemble des dispositions légales liées à la publicité doivent s’appliquer ainsi que les recommandations déontologiques de l’ARPP.
Les juges ont par ailleurs effectué la même analyse en notant par exemple que le fait que l’intermédiaire qui relaye le contenu publicitaire soit un internaute ordinaire qui s’adresse à son « réseau d’amis » n’enlève en rien le caractère publicitaire du contenu, comme l’a jugé la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 3 juill. 2013, n° 12-22.633, ANPAA : JurisData n° 2013-013917 ; Comm. com. électr. 2013, comm. 104) .
Apparition dans une publicité et mannequinat
S’agissant du statut des personnes apparaissant dans une publicité, l’article L7123-2 alinea 1 du Code du travail prévoit expressément qu’« Est considérée comme exerçant une activité de mannequin, même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel, toute personne qui est chargée présenter au public, directement ou indirectement par reproduction de son image sur tout support visuel ou audiovisuel, un produit, un service ou un message publicitaire ; … ».
Aussi, peu importe que les personnes en cause n’exercent pas la profession de mannequin à titre habituel. En application de cette disposition, les influenceurs apparaissant dans une publicité doivent être considérées comme des mannequins.
Dans ce cadre, il s’agit alors d’appliquer le régime correspondant tel que prévu dans le Code du travail et dans la convention collective nationale des mannequins adultes et mannequins enfants de moins de 16 ans employés par les agences de mannequins du 22 juin 2004.
Obligations découlant du statut de mannequin
L’article L7123-3 du Code du travail prévoit que « Tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin est présumé être un contrat de travail », une circulaire interministérielle ayant expressément complété qu’ « Il résulte de ces dispositions qu’un mannequin ne peut être considéré comme un travailleur indépendant et être payé sur facture. ».
A noter que le mode de rémunération n’importe pas et notamment que la rémunération soit en nature. Dans une décision en date du 5 octobre 2016 (CA Paris, 5 oct. 2016, n°13/11535), la Cour d’appel a admis que devait être considéré comme un travail la relation entre un modèle et un fabricant de vêtement sous la forme d’un contrat de « prise de vue et de cession des droits d’image » « à titre gracieux » en échange de l’attribution de vêtements par la société au modèle pour une valeur déterminée.
En revanche, dès lors que la présence du mannequin n’est plus requise, la rémunération due au mannequin pour l’exploitation d’un enregistrement n’est pas considérée comme un salaire (article L7123-6 du Code du travail). Il faut donc établir au titre de cet article un accord de cession de droit à l’image séparé, qui rémunère l’exploitation de l’image du mannequin.
La rémunération du mannequin se décompose donc en deux parties : un salaire pour la prestation et une rémunération pour la vente ou l’exploitation de l’enregistrement de sa prestation.
S’agissant de la convention collective, elle prévoit une cession des droits à l’image des mannequins pour les utilisations « en France durant 12 mois uniquement dans la presse et dans les catalogues VPC, sans rémunération supplémentaire au bénéfice de l’employeur » (article 16.2). Pour toutes autre utilisation une cession doit être établie faisant mention a minima de la campagne concernée, du produit, des supports et media, de la durée et du territoire d’exploitation et un renvoi à la prestation concernée (article 16.5). De manière habituelle, les contrats de cession de droits à l’image sont conclus pour des durées d’un an renouvelable avec des prix de cession annuels à payer au renouvellement. La convention établie par ailleurs des rémunérations minimales à prévoir au contrat de travail des mannequins, notamment selon l’expérience du mannequin.
Mannequinat et agence de mannequins
Le recours à des mannequins implique de passer par une agence de mannequins. L’article L7123-17 du Code du travail établit que « Lorsqu’une agence de mannequins met un mannequin à la disposition d’un utilisateur, un contrat de mise à disposition est conclu par écrit entre l’utilisateur et l’agence. Ce contrat précise les caractéristiques de la prestation demandée au mannequin. (…) ».
Aussi, la relation entre les parties est tripartite et met en rapport l’agence de mannequins et l’utilisateur de celui-ci par le biais du contrat de mise à disposition (contrat commercial) et l’agence et le mannequin par le biais du contrat de travail. Il y a donc un contrat de mise à disposition de mannequin, un contrat de travail et un contrat de cession de droit à l’image à établir. Par exception, il est possible pour l’utilisateur final d’embaucher directement un mannequin sans passer par une agence, à condition qu’il n’y ait pas d’intermédiaire (agence de publicité, producteur etc.).
Il doit ici être noté que l’activité d’agence de mannequins est une activité règlementée qui suppose d’obtenir une licence (Article L7123-11 du Code du travail).
Enfin, il peut arriver que les marques et les influenceurs établissent des contacts non commerciaux. Une marque peut notamment transmettre ses communiqués de presse aux influenceurs, les inviter à des évènements ou à essayer leurs produits, sans que l’influenceur n’est d’obligation de communication à cet égard.
Dans ce cadre, il est important de rester vigilant et il reste mieux que le public soit informé de manière transparente en signalant notamment que la marque a invité l’influenceur ou mis des produits à disposition de l’influenceur à titre gracieux.
Il est également à noter qu’au delà de son statut de mannequin, l’influenceur peut aussi être auteur de ses créations ou artiste-interprète… il est nécessaire d’étudier chaque situation afin de mettre en place le ou les contrats idoines. Pour se faire, prendre conseil auprès d’un avocat spécialisé est fortement recommandé afin d’étudier les spécificités de la relation entre les parties et celles du projet et de répondre au mieux aux besoins des parties impliquées.
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