Les aides publiques à la création cinématographique sont nombreuses et primordiales dans le cadre de la production française, qu’elles proviennent du CNC, des régions ou de tout organisme public. Néanmoins, la quote-part des aides publiques dans le financement d’une oeuvre est limitée et doit respecter le seuil d’intensité des aides publiques applicable à l’œuvre en question. Cela signifie que le financement du film ne peut dépasser un certain pourcentage de financements publics. Il est important de rappeler que les aides publiques accordées par les états européens, et notamment les aides destinées à promouvoir la culture, doivent répondre aux exigences des article 107 et 108 du Traité fondateur de l’Union Européenne (TFUE). Le système français d’aide au cinéma a ainsi été jugé conforme par la Commission européenne dès 1992 (décision du 29 juillet 1992 N7/92) et encore confirmée le 22 mars 2006 (c (2006 832)). Afin de clarifier la situation, nous proposons ici un aperçu des dispositions en place au sein du Règlement général des aides financières du CNC (RGA) s’agissant du seuil d’intensité des aides publiques, et notamment des dérogations existantes.
L’article 211-16 du RGA prévoit que « Le montant total des aides financières attribuées pour la production d’une œuvre cinématographique de longue durée déterminée ne peut (…) 2° Avoir pour effet de porter à plus de 50 % du coût définitif de production de cette œuvre et, en cas de coproduction internationale, à plus de 50 % de la participation française, le montant total des aides publiques. »
Il est cependant entendu que l’article 211-17 prévoit des dérogations à ce seuil, accordées par le président du Centre national du cinéma et de l’image animée, dans la limite de 60 % et sur demande motivée de l’entreprise de production, pour les œuvres cinématographiques « difficiles » ou « à petit budget ». C’est à dire des premiers et deuxième films ou des films dont le budget total est inférieur ou égal à 1 250 000 €.
Le seuil d’intensité peut être particulièrement problématique dans le cadre des projets fragiles ayant du mal à obtenir des financements de la part des diffuseurs (télévision, distributeur…) et des acteurs économiques (investisseurs privés, SOFICA), et ce malgré la dérogation en place. En ce sens, durant le festival de Cannes 2018, le Syndicats des Producteurs Indépendants a ainsi exprimé le souhait que le seuil soit augmenté, afin de favoriser la diversité des productions et de faciliter la production de premier films ou de films « difficiles ». Il est entendu qu’une telle reforme devrait être approuvée par la Commission européenne, au vu des articles 107 et 108 du TFUE.
Nous pouvons d’ores et déjà noter que, dans le cadre de coproductions internationales et de l’aide au Cinéma du monde, le seuil d’intensité des aides publiques peut être porté à 80% pour les œuvres éligibles au premier collège (1ers et 2nds longs-métrages), ou réalisées en coproduction avec une liste de pays spécifiques à la cinématographie fragile ou dont le budget final est inférieur à 1 250 000 € (Décret n° 2012-543 du 23 avril 2012 relatif aux aides aux cinémas du monde)
S’agissant des aides à la distribution, le seuil d’intensité est également fixé à 50% (article 221-4 ) mais on peut souligner ici que depuis la délibération n° 2016/CA/10 du 30 juin 2016, article 3, la dérogation en matière d’aide à la distribution peut permettre au seuil d’intensité d’atteindre 70%, ce qui peut inciter les distributeurs à s’intéresser à des projets de films « difficiles » tels que détaillés ci-avant, les films à « petit budget » ainsi que les programmes d’œuvres cinématographiques de courte durée.
S’agissant de la production de courts-métrages, il est aussi intéressant de noter que, depuis 2016, l’article 411-9 du RGA établit à 80% le seuil d’intensité des aides publiques dans le cadre de la production d’une œuvre cinématographique de courte durée. Cela permet une part très élevée de financements publics et soutient la production de courts métrages.
Enfin, en matière d’œuvres audiovisuelles, le seuil d’intensité est également de 50% (article 311-22 du RGA) avec une dérogation possible ) hauteur de 60% pour les œuvres audiovisuelles « difficiles « ou « à petit budget », portée à 80 % pour les œuvres difficiles appartenant au genre documentaire de création, admises au bénéfice des aides financières sélectives à la production et à la préparation, dont le budget total est inférieur ou égal à 150 000 € par heure. Cette dérogation permet de soutenir les producteurs de documentaires et de renforcer la diversité en matière de création audiovisuelle. Pour l’application de ce qui précède il est entendu qu’une œuvre difficile « est celle qui présente un caractère innovant, peu accessible ou délicat, en considération, notamment, du sujet, du format, de la dramaturgie, de la réalisation ou des conditions de production. » et qu’un petit budget est inférieur ou égal à 100 000 € par heure.
Dans le cadre du développement et de la production ou coproduction de projets, il est nécessaire de considérer quel seuil d’intensité des aides publiques sera applicable afin de pouvoir déterminer un plan de financement cohérent et respectant le seuil ainsi déterminé.
PARTAGER CET ARTICLE
sl@avocatl.com
+33.1.83.92.11.67
121, boulevard de Sebastopol
75002 Paris
5ème étage / escalier A
Renseignez votre e-mail :